Depuis qu't'es loin, voisin, mon frère, l'hôpital pue comme la mort.
Toi, tu as franchi la rivière et manque un rêve à mon décor.
Ma vie s'arrête au bout d'mon lit, y'a tout derrière et rien devant.
Toi, tu me racontais ta vie et j'existais en t'écoutant.
Maintenant qu't'es mort, voisin, mon frère, j'ai envie de crier au secours
Et de me coudre les paupières pour faire comme si j't'avais toujours.
Et moi, je pleure parce que la mort, c'est pas marrant.
Parce que la mort, c'est dégoûtant, parce que la mort, ça te prend tout.
Ça te laisse comme une loque, ça plonge ta vie dans la boue
Et ça te noie et ça te bloque, ça te rend vieux, ça te rend fou
Et moi, je pleure, même que le jour où je mourrai
S'il est encore quelqu'un qui m'aime, je voudrais qu'il vienne pleurer.
Les docteurs m'ont tout pris de toi, ils ont lavé tes couvertures.
Quand t'es parti, je savais pas qu'c'était pour la grande aventure.
Ils t'ont fait franchir le couloir, un soir, pour qu'on le sache pas.
Le lendemain, dans ton tiroir, y'avait plus que tes chocolats.
Je savais pas le paravent, pardonne-moi, voisin, mon frère.
Mais quand ils mettront "Au suivant", j't'imaginerai mourir derrière.
Et moi, je pleure parce que la mort, c'est pas marrant.
Parce que la mort, c'est dégoûtant, parce que la mort, ça te prend tout.
Ça te laisse comme une loque, ça plonge ta vie dans la boue
Et ça te noie et ça te bloque, ça te rend vieux, ça te rend fou
Et moi, je pleure, même que le jour où je mourrai
S'il est encore quelqu'un qui m'aime, je voudrais qu'il vienne pleurer.
Je cherche et je me dis tout l'temps, je dis aux douces infirmières
"Qui va remplacer maintenant, mon ami, mon voisin, mon frère?
Et si c'était un mec méchant, qui n'me raconte jamais rien?
Si y venait personne avant longtemps?"
Elles me disent qu'elles en savent rien
Et moi, je suis seul et j'attends sans trop savoir, voisin, mon frère.
Peut-être que ce s'ra moi le suivant, l'prochain à franchir la rivière.
Et moi, je pleure parce que la mort, c'est pas marrant.
Parce que la mort, c'est dégoûtant, parce que la mort, ça te prend tout.
Ça te laisse comme une loque, ça plonge ta vie dans la boue
Et ça te noie et ça te bloque, ça te rend vieux, ça te rend fou
Et moi, je pleure, même que le jour où je mourrai
S'il est encore quelqu'un qui m'aime, je voudrais qu'il vienne pleurer.